Histoire & mémoire du quartier
La Courrouze dessine son avenir sans oublier son passé. Le projet urbain s’attache à conserver les traces et les marqueurs du temps. Explorez ici l’histoire du quartier…
L'histoire de La Courrouze en quelques dates clés
Des landes militaires à un quartier en renouveau
À l’origine, une lande aux portes de Rennes
Dès la fin du Moyen Âge, le manoir de la Courouze donne son nom à une vaste étendue sauvage, dépendant de la seigneurie de la Prévalaye. En 1675, le Duc de Chaulnes y passe en revue des milliers de soldats, puis y dresse un camp en 1692 : le destin militaire du lieu est scellé.
Une histoire militaire avant tout
En 1793, l’Arsenal de Rennes est créé. Rapidement, les installations s’étendent sur les terres de la Courrouze : ateliers, hangars, site de tirs, enceinte pyrotechnique. On y fabrique balles, obus, douilles, et l’on y stocke des dizaines de milliers d’armes. À son apogée, le site emploie jusqu’à 1600 civils, dont 400 femmes en 1884, dans des conditions de travail encore rudes.
Un foyer de luttes sociales
Au début du XXe siècle, l’Arsenal et la Courrouze voient se constituer les premiers syndicats d’ouvriers, dans le sillage du VIe congrès de la CGT qui se tient à Rennes en 1898. En 1904 et 1906, les salariés de l’Arsenal revendiquent la journée de huit heures. Puis vient la Première Guerre mondiale : l’activité explose avec plus de 18 000 employés et une production de dizaines de milliers de munitions chaque jour. Les ouvrières, qui ont remplacées les hommes partis au front, surnommées les « Munitionnettes » mènent une grève massive en 1917. Elles obtiennent des hausses de salaires : une victoire sociale marquante.
L’apogée puis le déclin
Nationalisé en 1937 sous le Front Populaire, le site est modernisé. À son pic d’activités, l’Arsenal de la Courrouze occupe plus de 100 hectares. Les ateliers sont disséminés par des merlons de terres qui modèlent le terrain pour limiter les risques d’explosion. Sous l’occupation, les Allemands tiennent l’Arsenal et le sabotent à la Libération. Relancé après 1945, l’Arsenal diversifie sa production mais finit par fermer en 1968. La Courrouze poursuit un temps son activité autour de la fabrication de shelters militaires dans l’actuel site des Halles en Commun, jusqu’à la fermeture progressive des derniers ateliers.



Des lieux, une mémoire vivante
Le quai de la mémoire
En août 1944, lors de la libération de Rennes, les derniers convois de déportation quittent la ville, dont un depuis les voies de triage de la Courrouze. Le train de Langeais, stoppé par les Alliés entre Angers et Tours, devient un symbole. Pour honorer cette histoire, un « quai de la mémoire » est aménagé en 2014 près des anciennes voies ferrées, accessible depuis la rue Jules Verne, au cœur d’un vallon transformé en parc et jardins partagés.

Cartoucheries, Casemates, Fulminaterie
Certains vestiges du passé ont fait l’objet de démarches participatives menées avec les habitants. C’est notamment le cas des anciennes Cartoucheries, transformées en salle associative dans le cadre du Budget participatif de la Ville de Rennes.
D’autres, comme les casemates autrefois dédiées au stockage de munitions et encore visibles au cœur du parc Dominos, s’apprêtent à être transformés en espaces ludiques pour les enfants.
Plus discrète, la Fulminaterie, restée inachevée lors de l’arrivée des Allemands, se repère rue de la Guibourgère grâce à sa haute cheminée.
Les Halles industrielles
Aujourd’hui, plusieurs halles ont trouvé une seconde vie au sein du quartier :
- Le Pavillon Courrouze, reconverti en Maison du projet urbain
- La Petite Rennes,
- La Fabrique, réhabilitée par l’entreprise Digitaleo
- La Halle de La Courrouze, transformée en lieu d’accueil d’événements
- Et plus récemment, les Halles en Commun, sur le site de l’ancienne entreprise Euroshelter, font l’objet d’un vaste projet de reconversion



D’autres vestiges à explorer
Lieu de stockage d’explosifs, La Courrouze présentait un risque d’incendie élevé. Des installations de secours jalonnaient le site comme le grand bassin ovale aux alentours des résidences de Maisons dans les bois, qui servait de réserve d’eau principale aux pompiers. Il sert aujourd’hui de bassin de régulation des eaux de pluie. Ses vieilles pierres couvertes de mousse demeurent comme témoin intemporel.
Autre structure marquante : le mur d’enceinte. Longtemps, la Courrouze fut un site clos, protégé par un haut mur en pierre percé de lourdes portes. Il a été largement conservé, côté boulevard de Cleunay à l’ouest et le long du boulevard Jean-Mermoz à l’est, comme une mémoire silencieuse des décennies passées.

Le parcours mémoire
Animé par le poète urbain Adrien Lecoursonnais et l’architecte Jacques Ligot, le projet « Quelle est la forme de la mémoire ? » consiste à concevoir un parcours de sculptures pérennes dans le quartier, comme autant d’objets-mémoire. Ces œuvres sont issues d’explorations urbaines, de rencontres, d’ateliers d’écriture, de maquettages et prototypages réalisés avec les habitants et anciens ouvriers de l’Arsenal.
Ce parcours sensible vise à proposer une autre lecture du territoire, ancrée dans ses récits, ses traces et son évolution.
Pour aller plus loin…
Le livre L’Arsenal de Rennes
Paru en 2012 aux éditions de Juillet, le livre L’Arsenal de Rennes, a été réalisé par un collectif d’anciens ouvriers du site. Il retrace, de manière minutieuse et fouillée l’histoire du quartier en s’appuyant sur une compilation de documents historiques, recherches et témoignages.
Rendez-vous au Pavillon Courrouze pour le consulter.

Ressources
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02/07/2025
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